Quelques Ingrédients Utilisés Par Le Niger Pour Cultiver La Paix Sociale

Le Niger est un pays longtemps réputé pour sa culture de paix et de quiétude sociale. Il est l’un des rares pays de l’Afrique de l’Ouest qui affichent au compteur zéro génocide, zéro guerre civile, zéro massacre d’étrangers, zéro partition du pays, zéro sécession irrédentiste, etc. Et aucun de ses chefs d’Etat, de l’indépendance à ce jour, n’a fait l’objet de poursuite pour exactions, pour crime de guerre ou pour crime contre l’humanité. Ils sont étrangers à certaines institutions de répression comme la Cour Pénale Internationale (CPI).

Quelques  évitables putschs militaires ou des rebellions regrettables, oui ! Mais qui aboutissent pour la plupart sur des accords très vite trouvés et sans crime de masse comme c’est le cas ailleurs. Et c’est sûr que même sur le registre du terrorisme le compteur allait rester à zéro si le phénomène n’était pas malheureusement tentaculaire. C’est en effet bien soutenable qu’aucun des groupes terroristes dont les actions meurtrières éprouvent une partie de notre pays n’a érigé son foyer sur notre territoire. Tout était venu d’ailleurs ! Pour autant on ne se désolidarise pas des autres pays qui en sont durement touchés afin de joindre nos forces et nos recettes au service des efforts collectifs qui visent à éradiquer ou au mieux à contenir ce phénomène.

 

Bref ! Le Nigérien est historiquement un citoyen amoureux de la paix, pas trop porté sur l’effusion de sang. Même dans les moments les plus difficiles susceptibles d’éprouver sa patience, il se démarque par sa retenue. Mais cette capacité de rétention, ce réflexe de self-control, il a fallu le travailler et le cultiver sur des décennies, suivant des activités initiatiques ou culturelles bien ancrées. Aidé en cela par le destin qui a choisi pour nous certaines valeurs et des modes de vie favorisant la paix et la cohésion sociale. Nous allons en citer quelques-uns qui nous semblent plus consensuels. Ce sont entre autres :

1- L’islam : partagée par 99% de la population nigérienne, cette religion abrahamique est l’une des plus grandes religions au monde qui prônent l’entraide, la paix, l’amour et la tolérance à ses fidèles entre eux et vis-à-vis des autres non-musulmans. Elle leur enseigne qu’il ne faut ni susciter un conflit, ni l’encourager. Par exemple, c’est la seule religion au monde qui a institué que même si c’est un seul homme qui a été injustement tué, cela soit qualifié de génocide universel et sanctionné comme tel. En effet, Le Coran (Livre Saint de l’islam) nous apprend que : «…quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. Et quiconque sauve un seul homme, c’est comme s’il avait sauvé tous les hommes ». Sourate 5, verset 32.

C’est aussi l’islam qui leur a commandé de bannir tant en parole qu’en acte toute allusion et collision raciste, ethnocentriste, régionaliste ou politique. Les fidèles nigériens en sont pour la grande majorité d’entre eux convaincus du bien-fondé d’une telle recommandation et essayent du mieux qu’ils peuvent de s’en montrer dignes. Malgré que certains cherchent à abuser de leur crédulité pour semer des graines de discorde entre eux, ils restent toujours vigilants et les renvoient systématiquement à leurs intentions divisionnistes.

2-Les langues : quelque part le Niger doit aussi sa stabilité sociale au nombre raisonnable et à l’influence positive des langues présentes et parlées par sa population. Une population au sein de laquelle ses ethnies sont équitablement réparties et bellement représentées. Les langues, le Niger en compte dix officiellement plus le français. Trois de ces langues (Arabe, Haoussa, Peuhl) font parties du top 10 des langues les plus parlées en Afrique selon le dernier classement du Languemat. Et un Nigérien sur trois parle au moins une des 10 langues du pays en plus de sa langue maternelle. Ce qui est de nature à diminuer les risques de frictions car c’est indéniable que dans un pays plus il y a de langues engagées dans une compétition de primauté, plus il est exposé à tous les risques. Comme le montre le cas du Congo qui compte 214 langues ou du Nigéria qui en compte plus de 500. Ainsi, le Niger a la chance d’être épargné du déchirement social qui nait parfois de l’intolérance collective des pays babéliens.

3-Le mariage interethnique : si le mariage endogamique a longtemps caractérisé les sociétés nigériennes, il n’est plus d’actualité aujourd’hui. En tout cas, pas aussi profondément qu’avant. Car la prise de conscience collective encouragée par les lois naturelles du brassage culturel, a bousculé pas mal d’interdits sociaux que les ethnies s’émettaient auparavant entre elles sur la question spécifique du mariage. Désormais une belle peuhle peut fièrement s’amouracher d’un intelligent maouri à la joue complètement pavée de scarifications et vivre en pleine féerie dans la romance du mariage sans s’en cacher. Les deux familles qui sont désormais unies par les liens de ce mariage se jurent protection mutuelle et signent tacitement un accord de non-agression.

4-Le Cousinage à plaisanterie : divertissement diversement apprécié au sein de la société nigérienne, cette tendance nationale à chambrer son cousin d’une autre ethnie en partant d’un bon sentiment, est désormais devenue un fait de société très encourageant. Au point que les autorités, particulièrement en charge de la culture, en ont fait une activité d’élan national. En effet jusqu’à récemment, un festival national du cousinage à plaisanterie était organisé chaque année par le ministère en charge de la culture pour le renforcement des liens fraternels entre eux. Selon la règle de ce jeu social, ‘’tu ne tueras point’’ ton cousin, tu ne le spolieras point et tu es tenu de toujours lui venir en aide en cas de détresse. Par contre, tu as le droit de le descendre à mort par des historiettes qui l’accablent humoristiquement. En t’attendant aussi à la contre-boutade.

5-Le tournoiement des marchés hebdomadaires : en plus d’être des rendez-vous commerciaux qui rendent dynamiques les économies locales et rurales, les marchés tournants sont aussi des occasions d’interaction sociale qui permettent aux uns de se rendre dans les villages des autres pour ‘’cin kasuwa’’ (faire affaire). Mais pas que, car ce cadre de retrouvailles favorisent aussi des rencontres hasardeuses qui aboutissent parfois et contre toute attente sur des projets de vie ou d’affaires que rien ne pouvait prédestiner si chacun était resté dans son coin ou son village. Ce qui a le mérite positif d’éviter que les uns posent systématiquement des pépins aux autres. Le fort lien d’alliance qui s’est entre temps créé les dissuadant réciproquement d’avoir des penchants ou intentions conflictuelles.

Le Niger a encore plus d’une astuce dans son panier pour rester bon élève en matière de culture de paix sociale. Comme la lutte traditionnelle et autres manifestations sportives et culturelles qui font son bonheur social. Il nous reste à nous citoyens nouveaux de savoir les identifier, d’en mesurer l’importance et le potentiel de quiétude sociale, puis de les promouvoir pour leur donner toujours plus d’écho.

Add a Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *